Quatre agents contractuels de la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) avaient constaté qu’après 10 ans de carrière leurs pensions n’auraient pas été différentes, malgré le transfert de leurs droits acquis par ailleurs, vers le régime commun. En effet l’article 77 du Statut prévoit que « le montant de la pension d’ancienneté ne peut être inférieur à 4 % du minimum vital par année de service ». Ce minimum vital étant atteint après 25 ans. Constatation faite, ils avaient demandé soit le renvoi de ces droits à la caisse de pension de l’Etat membre soit le remboursement à leur profit.
La Caisse luxembourgeoise a refusé la proposition de renvoi du Directeur Général de la CJUE sans doute p.c. que l’article 11 de l’Annexe VIII du Statut stipule : « le fonctionnaire ne pourra faire usage qu’une seule fois (…) du transfert effectif »
Les intéressés ont donc saisi le tribunal de la Fonction Publique de l’U.E qui a rejeté leur demande le 20 juillet 2016 et ils se sont ensuite adressés au Tribunal de l’Union Européenne (chambre des pourvois) qui a également rejeté la demande[1].
En effet, selon le tribunal la perte subie par ces agents n’était pas certaine au moment de l’arrêt : il a considéré que tant que la carrière des quatre agents contractuels n’était pas terminée il n’était pas exclu que la pension finalement attribuée dépasse le minimum vital. Pour le tribunal, c’est donc seulement au moment du départ en pension définitif que l’intéressé sera en mesure de montrer que le transfert de ses droits n’a pas eu comme effet d’augmenter sa pension.
Dans son considérant 106, l’arrêt précise en effet que les droits à pension nationaux appartiennent à l’agent concerné en vertu de la jurisprudence et la non restitution à l’intéressé des droits transférés pourra conduire à un enrichissement sans cause de l’Institution. A cela on peut encore ajouter que la jurisprudence de la CJUE interdit les versements à fonds perdus par les travailleurs. (Voir e. a. Arrêt Adrien du 6.10.2016, points 27 et 30 et la jurisprudence y mentionnée).
En conséquence, si un agent ou un fonctionnaire a transféré des droits à pension et constate au moment de sa prise de pension définitive que ces droits sont « neutralisés » par l’effet de la règle du minimum vital, il pourrait demander le remboursement de ses droits inutilement transférés. .
On pourrait également se demander si cet arrêt n’ouvrirait pas également un droit au remboursement des contributions payées par les fonctionnaires ou agents ayant cumulé des droits à pension au-delà de 70%, parce qu’ils sont restés actifs pendant plus de 35, 37 ou 38 ans, selon le % acquis par an : 2 % 1,9 ou 1,8 % par an.
Si jamais un remboursement était imaginable, il faudrait cependant tenir compte :
- du délai de prescription de 5 ans pour obtenir un remboursement.
- de l’impossibilité de transférer à nouveau les capitaux vers une institution de retraite tant que l’article 12 de l’Annexe VIII du statut n’est pas modifié pour ré-ouvrir le droit à une pension nationale.
Hendrik Smets
Vice-président en charge des questions juridiques
[1] Arrêt Barroso / Truta e.a : CJUE, T-702/16 P(5) du 18 septembre 2018